Attention: je vais spoiler. Si vous voulez regarder le film sans rien connaître, ne lisez pas cet article.

Après une grosse insomnie, je me suis regardé Bird Box sur Netflix. Je n'avais pas regardé le trailer ni lu quoi que ce soit au sujet du film malgré la très grosse mise en avant du film par le distributeur. En fait, je l'ai regardé un peu par dépit. Le fait est que j'ai passé un bon moment (oui on peut passer un bon moment pendant un film d'horreur lol). Et lorsque j'ai regardé les critiques, j'ai été surprise de voir à quel point il se faisait démonter, que ce soit par les journaux ou par les gens.
Alors qu'on soit d'accord: non ce n'est pas un chef-d’œuvre mais c'est bien loin de l'immondice décrit par les critiques. Oui, il y a quelques grosses ficelles, les personnages sont assez clichés, et pour ceux qui aiment l'horreur pure et dure, c'est assez fade. Toutefois, si on considère le film comme un film d'angoisse psychologique, et bien, c'est assez solide, car c'est tout simplement une grosse métaphore.
Je vais décrire les choses de manière plutôt linéaire bien que le film ait une structure en flashback.
On suit Malorie, peintre et future mère (enceinte d'au moins 6 mois) qui a du divorcer et qui est en plein dénis de grossesse. Elle vit recluse dans sa maison et presque incapable d'empathie. Sa sœur est son seul lien avec l'extérieur. Alors que cette dernière l'accompagne à une échographie de routine, les choses dégénèrent. De mystérieuses entités (qu'on ne verra pas de tout le film) poussent les gens au suicide après un simple contact visuel. La sœur de Malorie succombe malheureusement à la vision infernale et elle-même est secourue par un groupe de personnes qui se sont réfugiées dans une maison.
Nous avons ensuite à faire à un huis-clos de survie assez classique. Des liens vont se former entre les membres du groupe. Malorie va même retrouver l'amour grâce à l'un d'entre eux, Tom. Je passe les rebondissements, mais elle va se retrouver à accoucher en même temps qu'une autre survivante et alors que tout part en sucette, elle se retrouve à devoir élever son propre enfant et celui de l'autre mère, morte juste après l'accouchement.
5 ans plus tard, Malorie et ses enfants essayent de rejoindre un refuge de survivants. Pour cela ils doivent naviguer pendant deux jours sur une rivière traitresse, le tout, les yeux bandés pour ne pas voir les créatures qui risqueraient de les rendre fous. Deuxième huis-clos un peu moins classique.
Finalement, ils atteignent le refuge et gros happy-end.
J'ai volontairement fait omission de beaucoup détails dans mon résumé, je garde ça pour l'analyse qui arrive :).
Effectivement, si on considère le film tel quel, y'a pas grand chose de palpitant. Pourtant ce qui est intéressant, ça n'est pas de savoir ce qu'il advient de l'humanité face à cette menace mortelle, mais bien l'évolution psychologique de Malorie. Elle apprend à accepter d'être mère et à redécouvrir l'espoir.
Elle est présentée comme une personne assez froide mais pas sans sentiment. Elle pleure la mort de sa sœur et même d'inconnus sous l'effet du choc. Toutefois, elle reste distante vis à vis des autres. Le rejet le plus fort est toutefois tourné vers la vie qui grandit en elle. Son dénis de grossesse ne se dénouera que dans le dernier acte du film, c'est à dire dans les quinze dernières minutes.
Elle va aller jusqu'à refuser de leur donner un nom: les appelant juste Fille et Garçon, coupant toute forme d'attaches sentimentales "visibles". Elle est très sévère avec eux, reproduisant le schéma d'éducation de son père (ce qu'on apprend en plusieurs fois) jusqu'à les menacer de les frapper s'ils n'obéissent pas.
Pourtant, elle va montrer tout le long du film qu'elle est prête à tout pour les sauver et que son instinct maternel est bien là. Et même si pendant un moment, on peut arriver à penser qu'elle préfère son fils (son propre sang) à sa fille (de l'autre mère), elle leur prouvera qu'elle les aime autant l'un que l'autre.
La métaphore maintenant. La rivière, les bandeaux et les monstres...
Le film commence par l'expédition sur la rivière. Tout le reste est raconté par de long flashback. Mais le cœur de l'histoire est bien raconté par cette rivière et non pas par le mystère apocalyptique. Malorie et ses enfants ont les yeux bandés pour ne pas voir les monstres. Bien que la mère essaye de naviguer, sa cécité forcée lui demande de se laisser porter en partie par le courant. Au fil de l'eau, des périls vont menacer la petite famille sur son frêle esquif et mettre à l'épreuve l'instinct maternel de Malorie. Vous commencez à voir la métaphore maintenant? :)
Les créatures, qui semblent avoir frustré bon nombre de spectateurs, ne sont une menace que si on les regarde. Même si elles semblent traquer les humains, jamais elles ne les attaquent. Elles sont un danger intangibles et au fur et à mesure que le film avance, on peut les assimiler aux peurs les plus profondes qui nous habitent. Elles sont liées à la psychologie des gens et chacun y voit ce qu'il veut.
Certaines personnes atteintes de troubles psychologiques ne sont d'ailleurs pas affectées de la même manière que le reste de la population. Elles ne sont pas enclines à se tuer mais elles se mettent à vénérer les créatures et les servent par effet de bord car elles souhaitent que tous puissent voir leur "beauté". Ces personnes voient dans des incarnations cauchemardesques quelque chose de magnifique.
D'ailleurs pour étayer l'argument selon lequel ces créatures ne représentent que nos peurs, on a qu'à un seul moment (un peu maladroit j'en conviens lol) une représentation de ces créatures. Elles sont toutes différentes et très lovecraftiennes. Pour ceux qui on lu du Lovecraft, vous devez savoir que bon nombre des créatures de l’écrivain sont liées aux peurs profondes et que leur simple vision peut rendre un homme fou. Le parallèle n'est pas là pour rien.
Le premier huis-clos est celui de la maison. Même s'il y a du monde dans la maison, Malorie reste dans un domaine qu'elle connait puisqu'elle ne quittait quasiment jamais la maison avant la catastrophe. Elle se protège du monde extérieure. Toutefois cette solution ne dure qu'un temps. Le mal est invité dans la maison et cause la désolation dans le groupe. Il ne reste plus qu'un noyau familiale composé de Malorie, Tom qui prend sans problème le rôle de père et des deux enfants. Ils apprennent à survivre isolés de tout et tentent de se cacher des fanatiques, mais là encore l'isolement ne fonctionne qu'un temps. C'est finalement, lorsque Malorie est forcée à quitter leur cachette pour se jeter à l'assaut de l'inconnu que le deuxième huis-clos commence et qu'elle finit par accepter son rôle de mère.
Ils n'ont plus la protection des murs de la maison et la seule chose qui les protège des horreurs qui vivent dehors sont la mince bande de tissu qui leur couvre les yeux. Ils doivent se laisser aller et tout affronter à l'aveugle. C'est sur cette rivière que vont s'affirmer les liens entre Malorie et ses enfants. Et c'est lorsque cette dernière finit par embrasser son rôle de mère qu'ultimement ils atteignent le refuge et sont sauvés. C'est d'ailleurs dans le refuge qu'elle leur donnera un nom, preuve de leur acceptation.
Les oiseaux. J'en ai pas du tout parlé mais le titre c'est pourtant "Bird Box" lol. On découvre assez tard dans le film que les oiseaux ont la capacité de sentir lorsqu'une créature est proche et lorsque ça arrive ils s’excitent. Il y a juste une allusion dans le premier tiers du film avec une volée d'oiseaux piaillant à l'approche d'un monstre, et c'est vérifié plus tard lors d'une expédition de ravitaillement au supermarché du coin.
Elle trouve des perruches en cage et après qu'elles ont montré qu'elles étaient capable de détecter les monstres, elle décide de les garder. Les oiseaux restent en cage, puis dans une boite tout le long du film. Et c'est lorsqu'elle atteint le refuge qu'elle les libère au milieu de ses congénères lorsqu'elle aussi a fini par trouver sa place. Les oiseaux sont donc une autre métaphore de la condition psychologique de Malorie.
Bilan:
Ca n'est pas un très bon film d'horreur si on s'attend à juste un film post-apo avec un mystère et c'est un plutôt bon film si on s'intéresse juste au parcours psychologique de Malorie qui est mis en abîme par l'histoire
Les moins :
- Personnages clichés, mais bon s'est souvent le cas dans les huis-clos un peu à la Stephen King. Mention spéciale au N-ième personnage gay qui meure dans les 5 minutes après qu'on a appris qu'il était gay... (la palme revient hélas à la nouvelle saison de Doctor Who avec un magnifique 10s). Sincèrement, je n'ai rien contre les scénarios inclusifs, bien au contraire, mais faites les choses bien... On a aussi le trou-duc joué par Malchovich qui est vraiment très très cliché mais à qui étrangement le scénario donne raison plus d'une fois et que personne n'écoute à cause de sa trou-ducitude ^^.
- Le rythme sur la fin. Le film est très lent mais la fin est rushée à l'infini. Le dénouement happy-ending passe d'autant plus mal.
- La phase mystique avec un des personnages qui donne une pseudo explication religieuse à ce qui se passe. Sa théorie est rapidement étouffée par le film et du coup ça sert littéralement à rien.
Les plus:
- La métaphore sur l'acceptation d'être mère.
- Ne jamais voir les créatures ni comprendre d'où elles viennent. Beaucoup ont trouvé ça comme un défaut, mais moi ça me convient parfaitement. Si on les considère comme nos peurs profondes matérialisées, on a pas besoin de beaucoup plus.
- L'acte de foi de Malorie au moment de passer les rapides. Au début, elle doit choisir lequel de ses enfants elle va sacrifier pour l'aider à passer les rapides car quelqu'un doit voir où elle dirige sa barque, mais elle ne peut se résoudre à en sacrifier un. C'est à ce moment qu'on comprend qu'elle les aime autant l'un que l'autre.
- L'ambiance. Perso, j'aime les ambiances un peu pesantes comme celle-là. Ca manque peut être un peu de claustrophobie dans la mise en scène mais c'est honnête.
Enfin voilà.
C'était ma review du film Bird Box ^^.
Des bisous!
1 commentaire:
coucou
Tu donnes envie de le voir, tu nous as parlé de ce film, mais la façon dont tu en fais l'analyse est très intéressante. bises
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